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Mezz Zapharelli : révéler l’icône, redéfinir le portrait, repenser l’image

photo portrait mezz zapharelli artiste peintre

De la fabrique des images à l’atelier : une œuvre qui ralentit le monde

Dans un paysage saturé d’images rapides, l’œuvre de Mezz Zapharelli impose une singularité rare : une peinture qui ne cherche pas à séduire, mais à tenir. Issue des métiers de l’image appliquée — costume, décor, défilé — l’artiste a très tôt appris la vitesse à laquelle se fabriquent les figures. À rebours de cet élan productiviste, elle construit depuis les années 80 une véritable éthique de la lenteur, où le portrait devient un lieu d’ajustement, de durée, presque de réparation.

Peinture contemporaine de Mezz Zapharelli montrant un portrait stylisé fragmenté en quatre panneaux, avec un fond géométrique rouge, bleu et blanc et le mot “WARHOL” répété en arrière-plan
Portrait stylisé en quatre volets par Mezz Zapharelli, sur fond géométrique rythmé du motif “WARHOL »

De l’industrie visuelle à l’atelier : un parcours qui fabrique un regard

Le chemin vers la peinture commence loin des pigments et des toiles. En Australie, Mezz Zapharelli découvre la production d’images à grande vitesse : costumes pour la télévision, décors de cinéma, créations pour groupes de musique. Ces cinq années intenses sont marquées par l’urgence, le rythme imposé, la nécessité d’effets immédiats.

Suit New York, cœur battant de la culture pop. Un appel du bureau d’Andy Warhol l’invite à célébrer l’anniversaire de l’artiste au Studio 54 : immersion directe dans une machine à icônes où la série est reine, où chaque visage devient potentiel motif de reproduction.

À Londres, Central Saint Martins resserre les exigences. Le geste doit être responsable. La forme doit tenir. Au terme d’une décennie d’exposition au flux, une décision radicale s’impose : investir la peinture.

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Portrait d'Alfred Hitchcock stylisé en couleurs vives représentant un homme au visage rond, avec un oiseau noir en vol au-dessus de lui, sur un fond géométrique rouge, bleu et blanc, peinture contemporaine de Mezz Zapharelli.
Portrait stylisé d’Alfred Hitchcock par Mezz Zapharelli, aux couleurs vives et formes géométriques

Années 80 : le portrait comme rupture, comme passage

Avec sa première série de portraits, l’artiste quitte le vêtement — surface sociale, immédiatement lisible — pour le visage, surface d’être. Les formats sont stricts, frontaux. Le temps s’allonge. La main ralentit. Les effets faciles disparaissent au profit d’une présence qui affleure lentement.

Ce changement n’est pas esthétique, il est éthique. Peindre devient une manière de désapprendre la vitesse pour laisser advenir une figure qui respire.

L’icône éprouvée : Marilyn, Hitchcock, Chanel

Lorsque Mezz Zapharelli aborde des figures hypermédiatisées, elle refuse le pastiche comme l’hommage. L’icône n’est pas décor ; elle est résistance. La peinture expose alors les coutures du mythe : ses zones de silence, la lumière qui insiste, la tension entre apparition et effacement.

Chaque tableau est un dispositif de freinage. Après l’accélération du monde visuel — défilés, séries, images publicitaires — Mezz Zapharelli offre à ces figures la possibilité de retrouver une densité, une gravité.

Peinture contemporaine de Mezz Zapharelli représentant une figure stylisée utilisant un compas, sur un fond bleu structuré de lignes géométriques et contrastes noir-bleu
Art contemporain de Mezz Zapharelli : le compas et la figure humaine

Le compas : un outil, une politique de l’axe

Motif récurrent, le compas n’a rien d’un élément décoratif. Il matérialise l’ambition de l’atelier : réajuster la figure, lui rendre son aplomb face aux distorsions du monde médiatique.

Le tableau cesse d’être vitrine ; il devient instrument de mesure, espace d’orientation. Ici, le style importe moins que l’axe. Ce qui compte, c’est la tenue de la figure, la justesse.

Une cohérence née de la friction

Le parcours de Mezz Zapharelli ne relève pas du roman biographique, mais d’une cohérence plastique forgée entre deux univers opposés :

  • l’usine de l’image : costumes, plateaux, défilés, répétitions, cadences, reproductibilité
  • la peinture : risque, lenteur, décision irréversible, responsabilité du geste

La première lui a donné la découpe, la vitesse ; la seconde lui offre le droit à la durée. C’est cette bascule, ce passage d’un régime d’images à un autre, qui constitue la force de son œuvre.

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